L’engagement des collectivités dans la vente de leurs biens : l’application stricte des dispositions du code civil.

Actualités juridiques Drouineau 1927

L’engagement des collectivités dans la vente de leurs biens : l’application stricte des dispositions du code civil.

Autres actualités

Fonction publique : procédure pour abandon de poste 

Fonction publique et procédure pour abandon de poste : la mise en demeure peut parfaitement inviter l’agent à reprendre son service en débutant par la visite médicale de reprise. Il est de jurisprudence constante qu’une mesure...

Le manque de préparation des communes littorales françaises au recul du trait de côte

Le 12 mars, à l’occasion de la publication de son rapport annuel pour l’année 2024, la Cour des comptes a formulé de vives critiques concernant la gestion du recul du trait de côte en France....

Les risques naturels dans l’instruction des autorisations d’urbanisme

La prise en compte impérative des risques naturels dans l’instruction des autorisations d’urbanisme. Tempêtes, incendies, inondations, érosion du littoral : les évènements climatiques de grande ampleur se multiplient et leurs conséquences s’aggravent. Les illustrations du dérèglement...

Les modalités de la gestion quantitative de la ressource en eau 

Instruction du 14 décembre 2023 relative à la mise en œuvre du décret n°2021-795 du 23 juin 2021 et du décret n°2022-1078 du 29 juillet 2022 relatifs à la gestion quantitative de la ressource en...

Urbanisme et prévention des incendies

Urbanisme et prévention des incendies : un projet de décret pris en application de la loi du 10 juillet 2023 complète le régime des « zones de dangers » La loi n°2023-580 du 10 juillet 2023 renforce les...

Arrêté de permis de construire : l’erreur matérielle a t-elle une incidence sur sa portée et sa légalité ?

L’erreur matérielle entachant l’arrêté de permis de construire est sans incidence sur sa portée et sa légalité. Le code de l’urbanisme impose que l’arrêté de permis de construire vise la demande de permis ou la...

Le non renouvellement des contrats des accueillants familiaux employés par des personnes morales de droit public

Focus sur le non renouvellement des contrats des accueillants familiaux employés par des personnes morales de droit public. L’article L. 444-1 du code de l’action sociale et des familles, dispose que : « (…). Les accueillants...

Les modalités de constat d’une désaffectation artificielle et les conditions d’application de l’article L. 2141-2 du code général de la propriété des personnes publiques

CAA Versailles, juge des référés 28 avril 2022 n°22VE00485 : modalités de constat d’une désaffectation artificielle et conditions d’application de l’article L. 2141-2 du code général de la propriété des personnes publiques Le juge des référés...

Fonction publique : La suspension d’une sanction disciplinaire

Fonction publique : La suspension d’une sanction disciplinaire par le juge administratif et le principe non bis idem Il est de jurisprudence constante, qu’il découle du principe général du droit selon lequel une autorité administrative...

Réforme 2024 de la procédure d’appel

Un nouveau décret 2023-1391 du 29 décembre 23 a paru au Jo le 31 décembre 23 : applicable à toutes les procédures d’appel engagées à partir du 1er septembre 24 (y compris devant une Cour de...

En découvrir plus sur le cabinet Drouineau 1927

Droits des collectivités locales, actes administratifs

L’engagement des collectivités dans la vente de leurs biens : l’application stricte des dispositions du code civil.

L’engagement des collectivités dans la vente de leurs biens : l’application stricte des dispositions du code civil. Les modalités de vente d’un bien lui appartenant par une collectivité répondent d’abord et avant tout aux dispositions du code général des collectivités territoriales. C’est ainsi, s’agissant des communes, que l’article L2241 – 1 dispose que le conseil municipal délibère sur la gestion des biens et des opérations immobilières effectuées par la commune. Il s’évince de cet article que, pour procéder à la vente d’un bien ou à son acquisition, le conseil municipal doit être préalablement consulté. Le texte précise s’agissant des communes de plus de 2000 habitants que toute cession d’immeubles ou de droits réels immobiliers donne lieu à délibération motivée du conseil municipal portant sur les conditions de la vente et ses caractéristiques essentielles.

Qu’en est-il dès lors lorsqu’un conseil municipal s’engage à vendre un de ses biens, en déterminant les caractéristiques essentielles de la vente, à savoir la détermination de la chose et de son prix ?

J’ai pu par le passé commenter une série de décisions rendues par les juridictions administratives sur ce sujet. Je découvre maintenant cette décision inédite de la troisième chambre civile de la Cour de cassation en date du 17 décembre 2020 rendue sous le numéro 19 19 218. Particulièrement instructive, elle énonce d’abord que la renonciation à un droit ne se présume pas, et ensuite qu’existait bien un droit de priorité reconnu préalablement à des riverains. L’hypothèse était la suivante : la commune de Roquebrune sur Argens avait par délibération de 2006 consenti à des riverains d’un terrain lui appartenant un droit de priorité pour l’acquisition des parcelles attenantes à leur propriété. Les riverains avaient manifesté le souhait que la commune leur rétrocédât les parties attenantes à leur propriété afin de pouvoir en assurer l’entretien régulier participant ainsi à la protection de l’environnement contre les incendies.

Or, cette même commune avait en 2011 vendu ces mêmes parcelles à une société cactus finances au grand dam bien sûr des riverains floués. Ceux-ci introduisirent donc une action en nullité de la vente qui fut accueillie par le premier juge puis par la cour d’appel. Sur le pourvoi, la troisième chambre rejette en énonçant qu’il n’était pas démontré que les riverains aient entendu renoncer à leur droit. Plus particulièrement dans son considérant numéro 7, elle énonce que la renonciation à un droit de se présume pas et ne peut résulter que d’actes manifestant sans équivoque la volonté de renoncer et ne se déduit pas de la seule inaction ou du silence de son titulaire. Ainsi admet-elle que rien ne démontrait que les riverains aient renoncé au droit de priorité qui leur avait été consenti. Elle ajoute qu’aux termes de sa délibération du 28 mars 2006, le conseil municipal de la commune avait approuvé la cession des parcelles appartenant à celle-ci aux propriétaires riverains à un prix déterminé. La Cour de cassation approuve la cour d’appel d’avoir ainsi juridiquement qualifié le droit reconnu aux riverains. Elle ajoute que la commune ne soutenait pas que son offre aurait été caduque à l’issue d’un délai raisonnable et que les riverains des parcelles en cause disposaient donc d’un droit de priorité pour leur acquisition, ce droit n’étant limité ni dans le temps ni dans la durée. C’est un enseignement extrêmement instructif qui oblige les collectivités, dans les délibérations prises au visa de l’article L2241 – 1 à une grande précision. Car, comme c’est souvent le cas hélas, si aucun délai n’est porté pour la validité de l’offre, alors cette dernière n’est pas limitée. Ainsi, un acquéreur bénéficiant d’une délibération pourra sans limite de temps revendiquer à son profit la vente. La cour achève son raisonnement en approuvant la cour d’appel d’avoir à bon droit, sans dénaturation, estimé que la violation par la commune du droit de priorité qu’elle avait accordé aux riverains de ces parcelles devait être sanctionnée par la nullité de la vente consentie à la société cactus finance.

Plus que jamais par conséquent, à l’aune notamment de la grande pression foncière existant désormais sur tout le territoire national, il est nécessaire de marier le Code civil et le code général des collectivités territoriales en y ajoutant le code général de la propriété des personnes publiques et le code général des impôts pour la rédaction des délibérations préalables aux actes administratifs qui, en la forme authentique, permettront au maire de recevoir et d’authentifier les ventes opérées par leurs collectivités (article L 1311-13 du cgct).

Auteur
Thomas DROUINEAU